top of page
Papillon - Eerie black.png

accueil       littérature       pile à lire       pop culture       contact      à propos

Surréaliste : des femmes qui font le mouvement !

Dernière mise à jour : 8 janv.

Depuis le 4 septembre dernier se tient au Centre Georges Pompidou une exposition phare de la rentrée culturelle : Surréalisme qui célèbre son centenaire. Si les grands noms déjà connus du public amateur viennent s’exposer en première ligne — André Breton, Max Ernst, Salvador Dalì, René Magritte, Giorgio de Chirico, Joan Mirò — une information en arrière-plan, saute aux yeux. Des femmes ! Oui, des femmes artistes qui ont contribué au mouvement surréaliste complètent le casting all star de Beaubourg. Rien d’exceptionnel ? Pas de quoi en faire un roman ? Rien n’est moins sûr.


De muse à artiste : la femme-objet, l’homme créateur


Il y a toujours eu des femmes dans l’art. C’est vrai. D’ailleurs la plus connue d’entre elles dans le monde c’est, roulement de tambours : La Joconde. Mona Lisa fait partie des rares figures féminines dont on connaît l’histoire. Pourquoi ? Tout simplement parce qu’elle a été peinte par la rock star de la Renaissance, le bien nommé Léonard de Vinci. Avant d’être artiste, ou plutôt avant d’être reconnue artiste, la femme joue un rôle de modèle. Objet fascinant et source d’inspiration, sa seule place tient en quatre lettres : muse. Le mouvement surréaliste initié par André Breton n’y coupe pas, même s’il est le témoin d’un changement radical.

Quel autre mouvement que celui se construisant contre l’académisme et « (…) en l’absence de tout contrôle exercé par la raison, en dehors de toute préoccupation esthétique ou morale » pouvait faire la part belle aux artistes femmes ? Preuve en est, le nombre de femmes artistes connues de leur vivant, exposées à leur époque malgré quelques résistances.


Un des artistes les plus populaires du mouvement, Salvador Dalì, à lui tout seul, incarne le paradoxe du surréalisme. Il trouve en Amanda Lear sa muse, l’intègre à sa vie de couple (de trouple du coup) pour s’en inspirer au quotidien, l’objectifie pour ses œuvres, mais refuse de la voir comme une artiste. Aïe, c’est la fausse note. Le début de carrière d’Amanda Lear sonne la fin de sa relation avec Dalì qui allait jusqu’à retourner son poste si elle passait à la télé.


Bon, on n’y comprend plus rien. Les hommes surréalistes le disent, ils veulent intégrer les femmes dans le mouvement. Mais en tant que quoi ? Visiblement pas chanteuse. Le mouvement surréaliste se veut politique, anticonformiste et attire à ce titre des femmes avec une volonté d’émancipation artistique et sociale. Dora Maar, Leonora Carrington ou Lee Miller attrapent le frein à main de la domination masculine pour faire le drift le plus mémorable de l’histoire du tuning (avant qu’il ne soit effacé par le récit de l’histoire de l’art).

Certain·es parlent d’affranchissement des femmes dans l’art, mais à ce niveau et à cette époque on peut carrément parler de révolution. Jacqueline Lamba et Valentine Hugo jouent dans la cour de ces messieurs et participent à la création de cadavres exquis. Dorothea Tanning illustre ses hallucinations angoissantes et ses fantasmes sexuels. Claude Cahun s’empare des questions autour de l’identité et du genre. Dora Maar compose des photomontages d’un érotisme à peine dissimulé. Pied au plancher, les femmes surréalistes se libèrent de tout. Elles emportent le mouvement dans une autre réalité, celle où l’art rencontre la politique et le féminisme.


Un mouvement artistique et féministe

Les « névrosées surréalistes », comme elles ont été qualifiées alors qu’elles étaient exposées aux États-Unis, en ont ras les poils de pinceaux d’être considérées comme des quotas. N’exister qu’en comparaison à un homme, très peu pour elles : voici 5 faits sur ces femmes qui ont fait bouger les choses.


1. Elles font pas genre

Être artiste n’est pas une condition où l’on est censé être affilié à un genre plus qu’un autre. Animé par cette volonté de redéfinition des codes et des positions genrées, un couple se met à travailler d’une seule main. Henri Julien et Marie No Pin signent leurs œuvres d’un seul nom : Seigle. L’un et l’autre peignent à tout de rôle, sans que l’on sache qui a fait quoi.  

 

2. Elles sont un gang d’artistes

Elles sont plusieurs. Ça a l’air de rien comme ça, mais en réalité c’est aussi rare qu’un plat végan au Texas. On connaît des exceptions isolées dans l’histoire de l’art comme Elisabeth Vigée Le Brun, Camille Claudel, Berthe Morisot ou Saunia Delaunay. Mais une formation de plusieurs femmes nourrissant et amenant un grand mouvement artistique aussi haut, c’est carrément surréaliste.


3. Elles remettent en question la place de l’homme

La légitimité de la position dominante de l’homme dans la société à travers le cadre du mouvement surréaliste est totalement remise en question. Leur existence au sein du mouvement constitue à lui seul une révolution des genres. Les œuvres de Claude Cahun, pour ne citer qu’un exemple, ont même fait l’objet d’études au sein des Gender Studies.


4. Elles dézinguent les codes

Nus masculins, paysages désolés, sujet animalier, mythologie, elles créent leur propre langage pour sortir du male gaze du mouvement. Bye les femmes enfants ou les figures de l’hystérique. Bonjour la vision avant-gardiste et intime des femmes artistes sur le devant de la scène surréaliste. Chacune de leurs créations semble vouloir dire « je suis artiste, voilà ce qu’est une femme, voici notre complexité, nous sommes multiples ».


5. Elles sont activistes

Première action politique : se dégager du rôle qu’on leur a assigné. Ni muses ni soumises, il n’est plus question d’être l’objet du désir des hommes. Nombreuses sont les femmes d’artistes avant d’être artistes femmes et il n’est pas simple de se sortir des carcans de leur cadre. Elles s’organisent en réseau pour s’exprimer en tant que plasticiennes. C’est ce qu’on appelle de la sororité ! Au-delà de leur propre carrière d’artiste, certaines s’engagent politiquement. Le mouvement emmené par Breton prend un tournant à l’extrême gauche avec le communisme.


Bref, des ultra badass inspirées et inspirantes qu’on retrouve dans tous les codes de la pop culture, de la mode à la pub et qui méritent bien plus que quelques accrochages chez Pompidou !


Pas si surréaliste que ça


Des femmes qui contribuent activement à un mouvement d’art majeur avec un impact mondial : pas si surréaliste que ça ! Mais alors pourquoi a-t-on l’impression de découvrir l’info ? Si à leur époque beaucoup ont été exposées, connues et même étudiées, l’histoire a fait son travail de sape pour les effacer et ne valoriser que leurs homologues masculins. La marque d’effaceur la plus efficace de l’histoire : l’homme. Eh oui, avec l’histoire de l’art c’est le jeu de tu m’vois, tu m’vois plus. Si depuis des travaux contemporains redonnent leur place aux femmes artistes, il n’en est pas moins difficile de les réhabiliter à leur juste valeur auprès des acteurs majeurs (musée, collection, marché de l’art, histoire de l’art).


La mise à l’honneur des artistes femmes dans l’exposition de la rentrée au musée Pompidou est-elle à la hauteur de leur talent et de leur contribution au mouvement ? La place donnée (accordée ?) à ces femmes artistes pose encore question. Parmi celles qui me chatouillent la plume, trône la question de l’intégration. S’agit-il d’une meilleure répartition ou d’une volonté de correction dans l’écriture de l’histoire de l’art ? Désolée de casser l’ambiance, mais y a comme un goût de peut mieux faire. La manière dont on évoque la représentativité des femmes dans l’exposition et donc dans le mouvement peut interroger sur la réelle intention du musée.


Isabelle est conceptrice-rédactrice et serial storyteller. Pour Cornée mag, elle est la chroniqueuse spécialisée dans la pop culture féministe. Le soir, elle troque son costume de brand experte pour faire la lecture à son chat. Quand les essais socio-politico-philosophiques lui font défaut, elle se blottit devant une série documentaire true-crime histoire de se détendre les coussinets.

TikTok : @studiomarscontent | Instagram : @studiomarscontent

0 commentaire

Posts récents

Voir tout

コメント

5つ星のうち0と評価されています。
まだ評価がありません

評価を追加

CORNÉE 
Le regard sur le monde du livre des 15-25 ans

Cornée est une création de l'agence éditoriale Miralta Édito

  • Instagram - Cercle blanc
  • LinkedIn - White Circle
  • TIC Tac
Logo full Lime

© 2024 par Miralta Édito

« Tout écrivain peut être heureux d’entendre un écho à ce qu’il a fait, même s’il ne visait pas à cela d’abord. Comme on sait, je suis plutôt quelqu’un qui doute de lui-même et de ce qu’il écrit. »

Philippe Jaccottet,

lauréat de nombreux prix dont le Goncourt de la poésie

bottom of page